04/12/2020

Valéry Giscard d'Estaing Une ambition contrariée | Les Echos

Un jeune président, gouvernant au centre, dont la volonté farouche de moderniser le pays se voit contrariée par une crise économique majeure. A quarante ans de distance, comment ne pas voir une similitude des destins entre le septennat de Valéry Giscard d'Estaing, disparu à 94 ans , et le quinquennat d'Emmanuel Macron, bientôt âgé de 43 ans ? Il n'est pas anodin que le second ait tenu à rendre hommage au premier. 1974-1981, 2017-2022: entre ces deux périodes, une relativité s'impose, mais une relation existe. Elle explique un quasi demi-siècle d'impuissance à transformer le pays.

« Deux Français sur trois »

Ce qu'éprouve aujourd'hui Emmanuel Macron, pourtant élu par ces « deux Français sur trois » que Giscard rêvait de rassembler, c'est cette tension entre ambitions réformatrices et contraintes économiques qui surgit en 1974 avec le premier choc pétrolier. Elle ne cessa, depuis lors, de brider la capacité d'agir des présidents.

Ces deux-là, dont deux générations ont espéré qu'ils leur dessinent un avenir, auront laissé deux mandats hémiplégiques. Une première partie ardente, c onsacrée à plonger le pays dans un bain de modernité . Pour l'un, ce fut la majorité à 18 ans, la légalisation de l'avortement et le divorce par consentement, mais aussi les bases d'un parc nucléaire, le collège unique et la fin de l'ORTF. Pour l'autre, ce fut la facilitation des licenciements, la baisse de la fiscalité sur le capital, le prélèvement de l'impôt à la source, l'extinction du statut du cheminot, la fin programmée du glyphosate mais aussi... la limitation de la vitesse à 80 km/h.

L'épreuve de l'urgence

Puis ce fut une deuxième partie de mandat passée à éteindre des incendies, provoqués l'un par l'envolée des prix du pétrole, l'autre par une pandémie de coronavirus. Emportées par des révolutions du monde qui s'écrivent depuis longtemps sans la France, la « société libérale avancée » de VGE et « l'esprit de conquête » d'Emmanuel Macron se sont fracassées sur l'urgence de réparer - l'un par la rigueur, l'autre par l'endettement - les conséquences sociales des crises économiques.

Les tensions d'aujourd'hui avaient bien éclos dans la fiévreuse décennie 70. Opposant la crispation du corps social à la modernisation de l'économie, la première s'était manifestée dès 1974 avec la grande grève des postiers contre la réforme du statut des PTT. Un deuxième antagonisme, entre souveraineté et mondialisation déjà, éclaire la tempérance du fédéralisme européen de Giscard président. Il ne faut pas s'étonner, enfin, que le même homme ait pu à la fois libéraliser le prix du pain, créer le CDD et planifier l'équipement téléphonique du pays : quarante ans de notre histoire économique, et de ses échecs, portent la marque de ce troisième conflit, jamais résolu, entre libéralisme et dirigisme. La tragédie giscardienne fut celle d'un impossible consensus. Mais l'épilogue de 1981 ne sera pas forcément celui de 2022.

source lesechos.fr 3 déc. 2020 

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