Des technologies “vertes” aux produits “durables”, les éléments de langage des grandes entreprises pour vanter leurs engagements écologiques sont en perpétuelle évolution, remarque The New York Times, qui s’intéresse au dernier-né en la matière : la “neutralité carbone”, “nouvelle formule écologique à la mode” mise en avant par plusieurs multinationales.
“Lors du récent Forum économique mondial [qui a eu lieu à Davos du 22 au 26 mai], de grandes entreprises se sont targuées d’être capables d’atteindre leurs objectifs de zéro émissions nettes”, énumère le journal, parmi lesquelles la multinationale suisse Nestlé, le géant brésilien de l’agroalimentaire JBS ou encore la firme américaine Amazon.
- La vidéo (en anglais) du New York Times, qui a entrepris de déconstruire “les mensonges climatiques des entreprises” :
La neutralité carbone, explique le quotidien américain, est une sorte de “point d’équilibre idéal”, selon lequel une entreprise ou une nation retirerait de l’atmosphère la même quantité de dioxyde de carbone – l’un des gaz à effet de serre responsables du réchauffement de la planète – qu’elle n’en émet. “Théoriquement, si toutes les entreprises et tous les pays y parvenaient, le réchauffement planétaire cesserait”, souligne le New York Times : “Formidable !”
Une parade pour repousser les échéances
En réalité, fait valoir le journal, “ces engagements des grandes entreprises pour le climat sont peut-être pires que de simples vaines promesses”, car ils pourraient faire perdre un temps précieux à la planète dans la lutte contre le réchauffement climatique. En premier lieu parce que nombre de ces engagements sont pris pour des horizons très lointains, ce qui revient à “reculer pour mieux sauter”.
Le géant JBS, par exemple, spécialisé dans la production et le conditionnement de la viande, “abat environ 9 millions d’animaux chaque jour”, ce qui provoque une quantité d’émissions de gaz à effet de serre colossale ainsi qu’une importante déforestation. La firme a annoncé l’an passé qu’elle atteindrait la neutralité carbone d’ici à 2040, mais elle a augmenté ses émissions de CO2 de 50 % ces cinq dernières années. Et le New York Times de résumer ainsi la stratégie à l’œuvre :
“Visiblement, JBS s’est donné dix-huit ans de plus pour décarboner son activité. C’est comme promettre à son médecin qu’on va cesser de fumer dans dix-huit ans et augmenter sa consommation entre-temps.”
Omissions et plans sur la comète
Autre réserve majeure, poursuit le New York Times, les omissions de ce type de grandes firmes quant aux effets néfastes de leurs activités sur le climat. La compagnie pétrolière et gazière américaine ExxonMobil, responsable d’autant d’émissions de CO2 que l’Allemagne entière, promet la neutralité carbone d’ici à 2050. Elle fait toutefois l’impasse sur les émissions qui seront engendrées par le pétrole qu’elle vend, ce qui fausse complètement le calcul.
Enfin, la dernière mise en garde n’est pas des moindres : les engagements de ces entreprises, insiste le New York Times, reposent souvent sur des technologies “qui sont loin d’être au point”.
L’une des pistes envisagées “paraît relativement prometteuse”, concède le journal : la capture directe du dioxyde de carbone dans l’air – qui repose sur l’aspiration du CO2 par “d’énormes ventilateurs” et son stockage en lieu sûr. Il n’existe toutefois à l’heure actuelle que dix-neuf dispositifs comme celui-ci dans le monde, ce qui permet uniquement d’aspirer en une année le CO2 produit par environ 700 Américains.
De même, Jeff Bezos, dirigeant d’Amazon, met en avant des solutions naturelles qui consistent principalement à planter des arbres. Or, calcule le New York Times, pour compenser les émissions annuelles de CO2 induites par Amazon, il faudrait planter “2,5 milliards d’arbres, soit l’équivalent de la surface du Costa Rica”. Chaque année.
Pour résumer, les multinationales sont très loin, contrairement à ce qu’elles affirment, d’être en mesure de compenser leur empreinte carbone.
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