Il y a d'abord et avant tout quelque chose de sidérant et surtout de pathétique dans le spectacle offert par la France, et l'exposition sur la place publique des différends internes aux socialistes hexagonaux. Passe encore s'ils étaient dans l'opposition : les déflagrations de leurs tirs ne toucheraient qu'eux-mêmes. Mais ils gèrent un gouvernement. Or ce n'est pas le cap d'une politique qu'ils donnent à une population perdue entre chômage et déclin économique, mais le spectacle de leurs règlements de compte. C'est irresponsable car quelle suite donner désormais au chaos politique ainsi créé ? Et c'est suicidaire, alors que les électeurs ont déjà pour beaucoup offert leur voix à l'extrême droite.
Une certaine classe, le bien commun, le sens des responsabilités, le sens de l'Etat – soyons désuets – auraient voulu qu'Arnaud Montebourg, dise en colloque singulier à son Président, son désaccord profond avec la politique menée, et démissionne. En lieu et place de quoi, les Français ont eu droit à un show public, histoire que le « petit peuple » ait bien imprimé que le père courage, l'ami des gens, le héros de la gauche, c'est lui, Montebourg. Qui peut penser que l'homme sert ainsi surtout le plein-emploi, et pas plutôt sa candidature pour la présidentielle de 2017 ? L'homme politique français souffre des mêmes maux que le pays qu'il souhaite tant diriger : il ne regarde que son nombril et fait la leçon aux autres avant de régler ses propres dérèglements.
Pas de méprise cependant. C'est la forme, le timing, la manière avec lesquels Arnaud Montebourg gère son combat qui scandalisent. Hier, François Hollande, qui a déjà un pied dans ces tombes qu'il aime tant commémorer, est devenu le Président de plus grand monde, même pas de ses propres ministres. Sur le fond par contre, le coup de colère de Montebourg fait mouche. Il a raison : la question de l'absurdité de la politique d'austérité hante tous les gouvernements d'Europe. Et oui, Renzi, le Premier ministre italien est à la tête d'une armée qu'il tente de lever contre elle. Le « Je suis responsable des gens, et du plein-emploi, moi, mais pas des déficits », clamé hier soir par le flamboyant rebelle, parle à plus d'un citoyen, économiste ou politique aujourd'hui. Ce lundi à Bruxelles, on avait tort de balayer l'éclat français d'un « nous ne nous occupons pas des affaires internes à un pays ». Car cette affaire-là est interne à l'Europe, même si, contrairement à ce que fait croire Montebourg, la réponse n'est ni évidente ni unanime.
La France, qui n'a jamais entrepris – contrairement par exemple à la Belgique – de véritables réformes pour juguler ses déficits et corriger ses défaillances structurelles et de politique économique, est le très mauvais porte-parole du débat « austérité/croissance ». Mais cela n'enlève rien à l'urgence de l'interpellation faite aux nouveaux dirigeants européens.
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