Un bilan paradoxal
C’est
d’abord l’État producteur de services essentiels qui devait être
transfiguré. Là où se focalisent toutes les attentes et files d’attente :
sécurité, enseignement, justice, santé notamment. Or, sur tous ces
champs, c’est la grogne qui a rattrapé le gouvernement. La grogne d’un
secteur de la santé notamment en souffrance face à l’insuffisance des
moyens et à l’intrusion des gestionnaires en col blanc, déconnectés des
problématiques de terrain. Celle des policiers, submergés par
l’explosion de leurs missions et le sentiment de déconsidération. Celle
des magistrats. Et au final, sur toutes ces fonctions essentielles,
l’État a été dans l’impossibilité de tenir sa feuille de route. Celle de
faire mieux, à ressources humaines constantes, mieux allouer, mieux
équiper et organiser. Partout, le gouvernement a dû se résigner à
augmenter les effectifs, pour répondre à des besoins et des attentes
toujours plus élevés et éponger des dysfonctionnements et le sentiment
d’inégalité d’accès que pointait la colère des gilets jaunes.
Emmanuel
Macron a finalement un bilan paradoxal. Obtenu à « l’insu de son plein
gré ». Sous la pression d’une population rétive à l’impôt, mais
désireuse de toujours plus de moyens au service du bien commun.
Replaçons son bilan en perspective longue.
Les moyens humains de l’administration ont augmenté
Les
données de la direction générale de l’administration et de la fonction
publique, qui ne sont disponibles que jusqu’à fin 2019, nous montrent
que la stratégie de repli de l’emploi public n’a jamais obtenu plus que
sa stabilisation sous Sarkozy. Sous Hollande le nombre de fonctionnaires
et de contractuels n’a que très légèrement augmenté. Mais ce bilan est
trompeur. La politique d’emplois aidés a servi de rustine pour répondre à
des besoins croissants. Sous Macron, au cours des deux premières années
du mandat s’est opéré un double mouvement. Un très léger repli des
effectifs publics globaux, lorsqu’on y intègre l’emploi aidé. Mais aussi
un mouvement de contractualisation de ces emplois aidés, qui aboutit in
fine à une hausse du nombre de fonctionnaires et de contractuels. Et
les statistiques de la Dares, qui permettent de suivre l’emploi salarié
public trimestriellement sur un périmètre un petit peu plus large,
indiquent sans surprise que globalement les moyens humains de
l’administration ont augmenté, jusqu’au milieu de l’année 2021. Sous la
pression des gilets jaunes et du covid.
Zoomons
sur l’hôpital, qui fut au cœur de toutes les passions et de toutes les
polémiques. Derrière la grogne, on observe bien un mouvement de repli du
nombre de fonctionnaires au sens strict et une érosion des moyens
humains, tous statuts confondus jusqu’en 2019, entamés avant lui. Une
précarisation donc sur fond de demande croissante. L’hôpital a bien été
un champ d’expérimentation d’une politique de rationalisation. La
souffrance hospitalière et la crise du covid ont fait imploser ces
velléités comme en témoigne la dynamique de l’emploi salarié dans le
secteur de la santé (qui déborde certes le champ de l’hôpital) que
rapporte la Dares.
Les fonctions régaliennes renforcées sous Macron
En
matière, de sécurité, de justice et de défense, le mandat d’Emmnuel
Macron aura été celui d’un renforcement des fonctions régaliennes.
Chacune de ces fonctions a vu croître le nombre de ses emplois budgétés
en loi de finances chaque année. Au premier rang desquelles, la police
et la gendarmerie, suivis de la justice. Mais l’armée également a vu ses
moyens humains renforcés de 300 à 500 fonctionnaires chaque année.
L’éducation nationale et l’enseignement supérieur auront été en revanche
les parents pauvres de cette politique, coupant court avec la politique
Hollande d’investissement social. Les données en dure de la DGAFP
fournissent trop peu d’éléments sur le mandat, si ce n’est un net point
de contraction en 2019. Mais les emplois budgétés par la suite en loi de
finances indiquent une stagnation des moyens et une préférence
gouvernementale pour la revalorisation des carrières.
Et,
in fine, le président qui prétendait réformer envers et contre tout la
réalité aura été comme ses prédécesseurs réformé par la réalité.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Ce blog est ouvert à la contradiction par la voie de commentaires. Je tiens ce blog depuis fin 2005; je n'ai aucune ambition ni politique ni de notoriété. C'est mon travail de retraité pour la collectivité. Tout lecteur peut commenter sous email google valide. Tout peut être écrit mais dans le respect de la liberté de penser de chacun et la courtoisie.
- Je modère tous les commentaires pour éviter le spam et d'autres entrées malheureuses possibles.
- Cela peut prendre un certain temps avant que votre commentaire n'apparaisse, surtout si je suis en déplacement.
- Je n'autorise pas les attaques personnelles. Je considère cependant que ces attaques sont différentes des attaques contre des idées soutenues par des personnes. Si vous souhaitez attaquer des idées, c'est bien, mais vous devez alors fournir des arguments et vous engager dans la discussion.
- Je n'autorise pas les commentaires susceptibles d'être diffamatoires (au mieux que je puisse juger car je ne suis pas juriste) ou qui utilisent un langage excessif qui n'est pas nécessaire pour l'argumentation présentée.
- Veuillez ne pas publier de liens vers des publicités - le commentaire sera simplement supprimé.
- Je suis pour la liberté d'expression, mais il faut être pertinent. La pertinence est mesurée par la façon dont le commentaire s'apparente au sujet du billet auquel le commentaire s'adresse. Si vous voulez juste parler de quelque chose, créez votre propre blog. Mais puisqu'il s'agit de mon blog, je vous invite à partager mon point de vue ou à rebondir sur les points de vue enregistrés par d'autres commentaires. Pour ou contre c'est bien.
- Je considère aussi que la liberté d'expression porte la responsabilité d'être le propriétaire de cette parole.
J'ai noté que ceux qui tombent dans les attaques personnelles (que je supprime) le font de manière anonyme... Ensuite, ils ont l'audace de suggérer que j'exerce la censure.