N’est pas de Gaulle qui veut !
Emmanuel Macron a donc choisi de reprendre la main. Mais que peut-il bien annoncer que nous ne sachions déjà ? Qu’il faut plus que jamais appliquer les gestes barrières, que des couvre-feux sont nécessaires dans certaines zones à haut degré de contamination ? Il peut décréter, d’un ton martial, la mobilisation générale du pays, augmenter les amendes pour non-respect des règles sanitaires, et autres mesures sans doute nécessaires. Il peut aussi jouer franc jeu, reconnaître qu’il aurait fallu, depuis le confinement, lancer un plan d’urgence pour créer, à la mode chinoise, dans une forme d’économie de guerre, des centaines, voire un millier, de chambres de réanimation pour ne pas revivre la panique de mars dernier. Or, c’est exactement la même terreur qui gagne le milieu hospitalier aujourd’hui, comme si nous n’avions tiré aucune leçon du passé.
Dans cette affaire, il faut éviter de lancer des anathèmes, de chercher des coupables à mettre au pilori. Et pourtant, il semble que nous sommes au cœur du problème, celui d’un Etat tellement affaibli qu’il n’est plus capable de se lancer dans des programmes audacieux, hors normes. Les Français, qui ne sont pas des demeurés, auraient très bien compris que ce « plan de relance » urgentissime du secteur hospitalier était la clé, la condition sine qua non de réussite de l’autre plan de relance, celui de Bruno Le Maire. Sans doute après avoir applaudi avec ferveur et reconnaissance le personnel soignant, auraient-ils pu accepter de mettre la main à la poche pour un financement en urgence. Un plan Marshall anti-submersion des hôpitaux.
Emmanuel Macron va-t-il reconnaître cette incroyable atonie française ? Car, au fond, si la nation tout entière, dans un geste de solidarité, mais aussi dans la perspective d’échapper à un nouveau confinement, avait été sollicitée, sans doute aurait-elle accepté ce sacrifice. Mais Emmanuel Macron, contrairement, à son discours de mars, n’a pas été un chef de guerre. N’est pas Churchill ou de Gaulle qui veut. Si le locataire de l’Elysée, ce soir, pour ce rendez-vous capital pour le pays, joue les pères fouettards, morigène une jeunesse dont le mal de vivre finira par déboucher sur des catastrophes, s’il nous promet de payer « quoi qu’il en coûte » du chômage partiel à tire-larigot, aussi indispensable soit-il, sans s’attaquer à la racine du drame que nous vivons : le manque de lits hospitaliers, désormais accouplé à une crise sans précédent de vocations des infirmières et autres personnels soignants, alors ce rendez-vous ne sera qu’un bavardage de plus, qu’un coup d’épée dans l’eau. Mais n’est-il pas déjà trop tard ?
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