Ce soir-là, Zemmour avait affirmé qu'« ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c'est tout ce qu'ils sont. (…) Tous, tous, tous! » Avant de timidement nuancer ses attaques, relancé par Christine Kelly en fin d'émission. Une séquence négative pour l'image de Canal + qui a poussé la présidence du groupe de Vincent Bolloré à saisir son propre comité éthique.
«Manquement à l'honnêteté»
Le rôle de ce dernier ? S'interroger sur la place accordée à Eric Zemmour à une heure de grande écoute, de 19 à 20 heures. Et ce, alors qu'il n'y a plus de véritable débatteur face à lui, comme prévu au départ. D'après le délibéré, que nous nous sommes procuré, le conseil a tranché : « l'émission Face à l'info ne peut pas continuer à être diffusée sous sa forme actuelle ». Est clairement pointé du doigt « un manquement à l'honnêteté » de la part d'Eric Zemmour, qui a fait preuve « d'outrance » avec des propos « contraires à la charte déontologique du groupe ». En revanche, ce rapport mentionne que l'attitude de Christine Kelly face à Eric Zemmour a été « irréprochable ».
PODCAST. Eric Zemmour : portrait d'un polémiste aux visées politiques
Mais le comité s'interroge sur la façon de « se prémunir contre le risque de réitération », tout en insistant sur la liberté d'expression et d'opinion, « à condition que leur expression ne tombe pas sous le coup de la loi et soit toujours respectueuse des personnes et des faits ». Est également souligné que « les propos incriminés ont préalablement été enregistrés » puis diffusés in extenso en différé sans qu'ils soient coupés par la direction de la chaîne, « alors que cela lui aurait été possible ».
Le comité conclut ainsi : « Ni le différé, même si le délai entre l'enregistrement et la diffusion était allongé, ni un éventuel retour au format originel (NDLR : avec un contradicteur quotidien et non hebdomadaire, comme actuellement), ne seraient de nature à permettre la préservation des impératifs d'honnêteté, d'indépendance et de pluralisme. » Avant d'ajouter que l'émission doit « s'ouvrir davantage à la diversité des opinions dans le respect de leur expression contradictoire, ce que ne permet pas son organisation actuelle autour d'un éditorialiste vedette » et omniprésent. Soit moins d'Eric Zemmour.
Déjà condamné en septembre à 10 000 euros d'amende
Contactée, la Société des Rédacteurs (SDR) de CNews rejoint le comité d'éthique sur « la nécessité d'apporter des changements à l'émission », mais préconise plutôt « le retour à un contradicteur fort face à Eric Zemmour chaque soir. » Pour le syndicat + Libre, également auditionné dans ce dossier, il faut davantage de précautions : « Il n'y a aucun problème à ce qu'Eric Zemmour s'exprime sur l'antenne, en tant qu'invité parmi d'autres. Mais pas qu'une émission tourne autour de lui, même avec un contradicteur pendant une heure, alors qu'il a été condamné à plusieurs reprises pour incitation à la haine. Personne ne songerait à faire débattre Dieudonné tous les jours… » De son côté, la direction du groupe Canal + assure entamer « une réflexion pour modifier Face à l'info » sans donner plus de précision sur les changements envisagés ni de date.
Du côté de la justice, le parquet de Paris a ouvert une enquête pour « provocation à la haine raciale » et « injures publiques à caractère raciste », en parallèle de la plainte de SOS Racisme et de la Licra, auxquelles se sont ajoutées celles de plusieurs départements. Aux magistrats de trancher, alors qu'Eric Zemmour a été condamné fin septembre à 10 000 euros d'amende, pour les mêmes motifs, après son discours sur l'islam et l'immigration, en septembre 2019, lors de la convention de la droite organisée par des proches de l'ex-députée du Front national - devenu RN - Marion Maréchal.
Suite à ces propos, le CSA, qui a déjà mis en demeure la chaîne, a dû saisir le rapporteur indépendant qui décidera de l'ouverture d'une procédure de sanction. Le CSA a également saisi le procureur de la République. C'est la troisième fois que le CSA saisit le procureur de la République pour des propos tenus par Éric Zemmour.
Eric Zemmour versus Michel Onfray... on aurait pu trouver mieux comme contradicteur. Et Zemmour reste toujours dominant.
RépondreSupprimer