Éric Zemmour fait ce qu’il veut. Il dit ce qu’il veut et, quoi qu’il dise, il occupe le terrain, attire la lumière et étouffe la concurrence. Qui, à part lui ? Qui d’autre que lui ? Produit fraîchement lancé sur les étals politiques, il bénéficie de l’effet nouveauté. Passé des lucarnes aux salles de spectacle, il profite d’un « vu à la télé ». Son interminable teasing, je ne suis pas candidat, ou pas encore, ou pas déjà, ou pas sûr, relève en outre des meilleures stratégies marketing. Un candidat sans l’être qui n’en finit pas de se faire désirer, c’est aussi malin qu’une marchandise qui joue de sa rareté pour faire monter son prix. Éric Zemmour s’y entend pour se vendre et, vendant son livre, s’acheter accessoirement une campagne.
Il n’y a pas que ça. Il y a qu’Éric Zemmour n’a pour limites que celles qu’il se donne, lui-même, tout seul, et il ne s’en donne pas beaucoup. Il y a qu’il paraît libre comme personne, sans précaution ni aucun plafond. Et cet affranchissement plaît. D’autant que, pour l’heure, au stade où en est encore la précampagne présidentielle, il est sans concurrence.
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Champ libre
Côté gauche, n’en parlons même pas, on n’entend personne, ou seulement François Hollande. Est-ce pour justifier son énième tour de France ? Il publie son énième livre, particulièrement aimable pour les candidatures de son camp, qualifiées de « lilliputiennes » et condamnées à des batailles aussi « picrocholines que microscopiques ». Merci, François, pour ce coup de main (et de pied) en toute solidarité socialiste !
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À l’extrême droite, le champ naturel de Zemmour, Marine Le Pen n’est que prudence et calme « des vieilles troupes ». Après des années de dédiabolisation, on imagine mal qu’elle puisse sortir de ses gonds et revenir aux polémiques du passé. Fichu Zemmour qui la condamne à opposer un simple amusement apitoyé aux outrances de cet impertinent freluquet qui vient brouter sur ses terres.
Quant à la droite républicaine, elle en est, au moins jusqu’au congrès du 4 décembre, à une triste stratégie du bâillon. Interdit à chacun des six compétiteurs de LR de s’en prendre l’un à l’autre, ni de lancer une idée qui rudoierait les valeurs républicaines qui les unissent tous, promis juré. Les voilà donc réduits, les six, pour mieux se distinguer les uns des autres, à taper chacun davantage sur Macron, lequel se trouve bien malgré lui promu en caisse de résonance de leurs ardeurs respectives. Tu parles d’une originalité, s’attaquer au président en exercice que l’on prétend remplacer !
Seul en scène
C’est dire le champ libre laissé à un Éric Zemmour qui se régale de son inespéré one-man-show. Seul en scène ! Il dit ce qu’il veut, du vrai, du dérangeant, et du n’importe quoi. Comme un artiste qui ne se sent ni ne se tient plus. Saisi par l’ivresse. Comme Dieudonné, hier. Ou un Bigard à sa manière. Il dit le plus honteux, le plus provocant, le plus haineux, le plus révisionniste, le plus faux et parfois le plus bête, ce qu’il n’est pas. Les femmes, Pétain, l’islam…
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On ne fait pas ici la liste de ses saillies, autant de sketchs débectants pour attirer le peuple. Le bizarre est qu’il suscite si peu de répondant, comme si ce peuple qui l’applaudit, trop de candidats avaient peur de se le mettre à dos. À moins qu’ils n'escomptent qu’une fois déclaré, entrant dans le dur, Zemmour perde de ses appâts.
Consultez notre dossier : Éric Zemmour, candidat ?
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