SOUS-MARINS : LA FRANCE L'A DANS L'AUKUS Par Philippe Mabille Directeur de la rédaction de La Tribune.18 septembre 2021 • N°17
Un Trafalgar dans le Pacifique… Depuis le temps que Michel Cabirol, notre spécialiste Défense en parle, il fallait bien que cela arrive. En 2015, pour les 30 ans de La Tribune, il avait écrit un scénario fiction sur les Une de La Tribune en 2045. Intitulé « Affrontements en mer de Chine, le pire évité » : son papier était prémonitoire.
En signant avec l'Australie et la Grande-Bretagne un partenariat stratégique baptisé AUKUS pour contrer les ambitions de la Chine dans la région indo-pacifique, l'Amérique vient de conduire Canberra à renoncer à la fourniture par la France de 12 sous-marins conventionnels. A la place, l'oncle Sam fournira des sous-marins à propulsion nucléaire, dans un message assez clair et agressif en direction de Pékin. D'une certaine façon, la nouvelle guerre du Pacifique a commencée en Australie avec ce nouveau pacte qui marque la montée des périls dans la région. La Chine n'a pas manqué de réagir en dénonçant « une mentalité de guerre froide » qui « sape gravement la paix et la stabilité régionale ». A l'heure où le fiasco du retrait américain d'Afghanistan interpelle sur la stratégie du gendarme du monde, cet épisode dont la France est une victime collatérale interroge aussi sur les risques de guerre chaude autour de l'avenir de Hong Kong et de Taiwan. Depuis la claque de l'annonce mercredi de la fin de ce « contrat du siècle » de Naval Group, l'Elysée se mure dans le silence, laissant les ministres de la Défense Florence Parly et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian en première ligne pour exprimer la colère du gouvernement. A tous ceux qui voulaient encore croire que Joe Biden serait un président différent de Donald Trump en politique étrangère, le maître de Washington vient d'adresserun sévère rappel à l'ordre en forme de « claque magistrale »à son allié français.
Macron n'avait pas tort en disant que l'OTAN était en état de « mort cérébrale ». Et l'affaire des sous-marins australiens, outre sa dimension industrielle, est aussi un symbole de l'affaiblissement de la France qui, bien que présente dans le Pacifique, n'y est qu'une puissance moyenne de peu de poids quand la tension y monte. Et ce n'est sans doute pas fini : dans la nouvelle géopolitique mondiale, Joe Biden semble bien parti pour faire perdre d'autres contrats à l'export à la France, s'inquiète Michel Cabirol. « La France l'a dans l'AUKUS », ironise-t-on sur Twitter. Ce naufrage en eau profonde aura de lourdes conséquences pour Naval Group, en perdition à l'export.
Poignardée par ses alliés australiens et américains, la France va certes exiger des « clarifications » et des compensations financières pour le groupe français, alors que des centaines d'emplois sont en jeu.
C'est un coup dur aussi pour Thales, actionnaire de Naval Group, et pour les sous-traitants. Avec des conséquences notables par exemple pour le groupe bordelais Ingéliance, qui avait créé une co-entreprise en Australie, explique Pierre Cheminade de notre bureau en Nouvelle-Aquitaine.
En matière de guerre du futur, il n'y a pas que les sous-marins qui font rêver les militaires du monde entier. Michel Cabirol a aussi interviewé Marc le Flohic, le PDG de Lumibird, un des leaders mondiaux qui convoite CILAS pour renforcer la souveraineté de la France dans les lasers, des armes incontournables pour les conflits de demain.
Pour en finir avec les sujets militaires, nous nous sommes penchés sur le budget de l'Armée qui sera présenté le 22 septembre avec le projet de loi de finances pour 2022 le dernier du quinquennat. Michel Cabirol y dévoile l'offensive de la ministre Florence Parly pour blinder ses crédits à la hausse… et répondre aux nombreuses sollicitations des industriels du secteur de l'armement.
Sur les sujets de société et de civilisation en France et dans le monde; et tout ce qui me passe dans la tête...
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