Est-ce une mauvaise plaisanterie ? Tous les espoirs sont permis quand on est vomi à ce point par le microcosme parisien, qu'on a publié des livres qui, comme Le Suicide français (Albin Michel), se sont écoulés à plus de 500 000 exemplaires, ou que l'on rassemble tous les soirs, de 19 à 20 heures, sur sa seule bouille, entre 800 000 et 1 million de téléspectateurs sur CNews.
Polémiste, lanceur d'alerte, il n'a pas, dira-t-on, un profil de présidentiable. Certes. Mais, après avoir épuisé tous les genres, il arrive que nos démocraties se donnent à des hors-venus, voire à des clowns, comme l'ont attesté les victoires de Donald Trump aux États-Unis ou de Beppe Grillo en Italie.
Sitôt cité le nom de Zemmour, attention à ce qu'on va dire : on entend déjà le cliquetis des menottes que la maréchaussée idéologique rêve de vous enfiler. Il est convenu de le honnir. Néofasciste ? Sans doute sa vision de l'islam est-elle biaisée par son histoire personnelle. Se définissant comme un Français d'origine berbère, il descend, comme beaucoup de Juifs d'Afrique du Nord, d'ancêtres qui habitaient l'Algérie bien avant la conquête du Maghreb par les Arabes, au VIIe siècle, et qui ont été chassés de leurs terres originelles, au nom de la « décolonisation », dans la bonne conscience générale. Ça laisse des traces.
C'est un vestige du passé : antimoderne, donc anti-Macron, Zemmour n'est pas du tout dans l'air du temps, ce qui n'est pas le moindre de ses atouts. Il incarne aujourd'hui le repliement sur soi, sur le passé, l'Histoire, la nostalgie de la grandeur. On peut tout lui reprocher, sauf de n'avoir pas une culture quasi encyclopédique à l'heure où l'ignorance se propage à peu près aussi vite que le coronavirus. Il a, de surcroît, une passion enfantine pour la France éternelle, qui n'a plus le droit de l'ouvrir ces temps-ci, sauf pour faire des mea culpa, en attendant d'être traînée un jour devant la Cour pénale internationale, où elle devra rendre compte de tous ses crimes contre l'humanité, dénoncés par l'actuel président en personne.
De Gaulle disait à son ministre de l'Intérieur, Christian Fouchet, en mai 1968 : « Nous serions le pays le plus fort du monde, sans cette indifférence, au fond, à ce qu'on appelle la nation. » Zemmour s'inscrit dans la filiation du Général. Son culte de la France est si entier qu'il en vient souvent à défendre l'indéfendable. Ainsi, Pétain, qui, à ses yeux, aurait « sauvé les Juifs français » alors que le maréchal cacochyme, incarnation vivante d'une des formules gaulliennes les plus fameuses (« la vieillesse est un naufrage »), les a, au contraire, enfoncés. En corrigeant, par exemple, de sa main les lois antijuives pour les durcir, interdisant aux Juifs, entre autres, de siéger dans « toutes assemblées issues de l'élection ».
Rares sont les personnages de l'histoire de France qui ne trouvent pas grâce à ses yeux. Dans Destin français (Albin Michel), Zemmour n'a même pas hésité non plus à réhabiliter Robespierre, dont l'obsession de pureté a défiguré la Révolution française. Prétendument hostile à la peine de mort, ce personnage grotesque et xénophobe, adulé par l'extrême gauche, est le concepteur de la loi du 22 prairial an II, qui institua la Grande Terreur en facilitant le travail des tribunaux révolutionnaires : n'ayant plus besoin d'avocats ni de preuves matérielles, ils pouvaient faire guillotiner à la chaîne et à la tête du client. Merci Maximilien ! La raison de la clémence zemmourienne à son endroit : pour abject qu'il fût, il n'en était pas moins français !
Il y a dans le cerveau reptilien de Zemmour - c'est pourquoi il lui sera beaucoup pardonné -, un amour sincère de notre cher et vieux pays que résume bien la célèbre formule américaine du XIXe siècle : « Right or wrong, my country » (1). Gageons qu'il ne se lancera pas cette fois-ci dans l'aventure présidentielle, ce qui aurait été une bonne nouvelle pour Emmanuel Macron, gagnant assuré des dégâts provoqués par ce potentiel missile antilepéniste. Mais il n'est pas exclu qu'il se lance par la suite. En attendant, quand on saura faire abstraction de ses propos de bistrot ou provocations absurdes, on se souviendra qu'il a réactivé une nouvelle forme de patriotisme, contre la haine de soi qui ravage la France.L'Italie, qui accepte l'union nationale derrière Mario Draghi, nous donne l'exemple. L'ancien patron de la Banque centrale européenne devenu président du Conseil italien bénéficie même du soutien « sans conditions » de Matteo Salvini, le souverainiste italien converti à l'Europe. Les Italiens sont décidément des Français de bonne humeur. Il est vrai que leur passe-temps principal n'est pas de déboulonner les statues ou de réécrire l'Histoire à l'envers !§
(1) Ce qui signifie littéralement : « Qu'il se trompe ou qu'il ait raison, c'est mon pays.
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