La
pandémie de coronavirus est un nouveau champ de confrontation entre
Pékin et Washington. Trump devrait au moins tirer les leçons des erreurs
chinoises, écrit cet observateur australien dans les colonnes du South China Morning Post.
La
crise du coronavirus semble être définitivement entrée dans l’arène où
se jouent en fin de compte toutes les questions cruciales ces temps-ci :
celle de la politique des grandes puissances. Si c’est bien le cas,
alors, à première vue, l’affaire devrait être rapidement entendue. La Chine a considérablement rattrapé les États-Unis
sur tous les fronts ces dernières années, que ce soit sur les plans
économique, militaire ou diplomatique. Mais sur les questions de santé
publique, le système de parti unique a échoué dès le premier obstacle.
Le premier réflexe des autorités chinoises a été de censurer toutes les informations sur le virus quand il a été découvert à Wuhan, dans le centre de la Chine. Puis elles ont fait pression sur les professionnels qui se trouvaient en première ligne, comme les médecins, qui souhaitaient alerter l’opinion, afin qu’ils se taisent [les premiers cas suspects détectés début décembre ont incité huit médecins à signaler l’existence possible d’un nouveau virus le 30 décembre ; ceux-ci ont été réprimandés comme diffuseurs de fausses nouvelles le 2 janvier ; la crise sanitaire n’a été officiellement reconnue que le 21 janvier].
Par conséquent, le virus s’est répandu depuis Wuhan dans le reste du pays, puis à l’étranger, plus rapidement que s’il avait été pris en compte plus tôt, et davantage de gens sont tombés malades et ont péri.
En théorie, la crise devrait donc nous raconter une histoire simple, celle de la formidable capacité de la Maison-Blanche à gérer une crise de santé publique, son système d’équilibre des pouvoirs la préservant du risque de commettre des faux pas, comme l’ont fait les Chinois. Mais avec le président Donald Trump aux commandes à Washington, l’affaire ressemble plutôt à une compétition serrée entre deux systèmes ennemis.
Alors que le nombre de personnes contaminées diminue rapidement en Chine, c’est soudain Washington qui semble vulnérable. Les cas confirmés se multiplient aux États-Unis, même si les autorités américaines ont procédé à beaucoup moins de tests que d’autres pays qui luttent pour enrayer la pandémie, comme la Corée du Sud.
L’idée de comparer les réactions de Washington et Pékin face à la crise n’a rien d’une invention médiatique. Loin de mettre de côté leurs différends ainsi que l’exigerait une crise de santé publique de portée planétaire, les États-Unis et la Chine se sont jetés à corps perdu dans un affrontement autour du Covid-19. Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a fait tout son possible pour parler du “virus de Wuhan” et a ouvertement reproché au Parti communiste chinois (PCC) d’avoir refusé de partager ses données avec les États-Unis [la communauté scientifique internationale s’est toutefois félicitée de la qualité des échanges avec ses collègues chinois]. Quant aux prestations de son gouvernement dans ce domaine, Pompeo a asséné : Je suis persuadé que nous saurons mieux gérer [la crise] que n’importe quel autre pays dans le monde.”
En Chine, la propagande reste le meilleur indicateur pour qui veut analyser ce qui se passe dans la tête des dirigeants du système de parti unique. Le gouvernement a d’ores et déjà publié un petit livre qui met en avant la gestion de la crise par Pékin. À Wuhan, le nouveau secrétaire du parti [son prédécesseur a été limogé] a dit mettre en place “une éducation à la gratitude” pour les habitants de la ville, en isolement depuis la fin janvier, afin de leur rappeler les superbes accomplissements des autorités [à la suite d’un concert de protestations sur les réseaux sociaux, il a transformé la campagne en “gratitude envers les habitants de Wuhan”].
À Pékin, le ministère des Affaires étrangères affirme maintenant que si le virus a été découvert à Wuhan, il n’en est pas forcément parti, ce qui permet à la Chine de se couvrir en alimentant les théories du complot sur une origine étrangère de l’épidémie [les États-Unis étant nommément désignés]. Et Pékin dépeint la bataille contre le virus comme une campagne altruiste au nom de la planète. Comme l’a dit l’ambassadeur chinois aux Nations unies :La Chine ne se bat pas que pour elle, mais pour le monde entier.”
S’il
s’agit de faire diversion, Pékin peut aujourd’hui raconter une histoire
beaucoup plus positive qu’il y a un mois. Mais surtout, la mise en
quarantaine brutale de centaines de millions de ses citoyens, isolés
chez eux, semble avoir endigué la propagation de la maladie. Si la Chine
commence à voir la lumière au bout du tunnel, alors que d’autres pays
se débattent, le président Xi Jinping et le système de parti unique
s’estimeront à la fois justifiés dans leurs décisions, et à l’abri de
toute critique.
Certes, les États-Unis ne sont pas la seule démocratie à citer en exemple dans le domaine de la gestion d’une crise de santé publique. Si le Covid-19 n’en est encore qu’à ses débuts sur leurs territoires, l’Australie, la Corée du Sud et Taïwan ont fait preuve, chacune à sa façon, de clarté et de fermeté face à l’épidémie, avec le soutien de systèmes de santé efficaces. Reste que Pékin ne se compare pas à ces économies. C’est avec Washington que la Chine est en concurrence.
La principale leçon de la pandémie semble être la suivante : il faut écouter les avis des spécialistes et communiquer clairement avec le public. Des leçons que la Chine a d’abord ignorées, ce qui lui a coûté cher. La Maison-Blanche de Trump est peut-être en train de commettre exactement les mêmes erreurs.
Le premier réflexe des autorités chinoises a été de censurer toutes les informations sur le virus quand il a été découvert à Wuhan, dans le centre de la Chine. Puis elles ont fait pression sur les professionnels qui se trouvaient en première ligne, comme les médecins, qui souhaitaient alerter l’opinion, afin qu’ils se taisent [les premiers cas suspects détectés début décembre ont incité huit médecins à signaler l’existence possible d’un nouveau virus le 30 décembre ; ceux-ci ont été réprimandés comme diffuseurs de fausses nouvelles le 2 janvier ; la crise sanitaire n’a été officiellement reconnue que le 21 janvier].
Par conséquent, le virus s’est répandu depuis Wuhan dans le reste du pays, puis à l’étranger, plus rapidement que s’il avait été pris en compte plus tôt, et davantage de gens sont tombés malades et ont péri.
La presse ne peut pas être réduite au silence
Aux États-Unis, en revanche, la liberté d’expression est garantie par la Constitution, ce qui veut dire que la presse ne peut pas être réduite au silence. Avec ses Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC), l’Amérique a accès à une source d’expertise indépendante et de haut niveau.En théorie, la crise devrait donc nous raconter une histoire simple, celle de la formidable capacité de la Maison-Blanche à gérer une crise de santé publique, son système d’équilibre des pouvoirs la préservant du risque de commettre des faux pas, comme l’ont fait les Chinois. Mais avec le président Donald Trump aux commandes à Washington, l’affaire ressemble plutôt à une compétition serrée entre deux systèmes ennemis.
Alors que le nombre de personnes contaminées diminue rapidement en Chine, c’est soudain Washington qui semble vulnérable. Les cas confirmés se multiplient aux États-Unis, même si les autorités américaines ont procédé à beaucoup moins de tests que d’autres pays qui luttent pour enrayer la pandémie, comme la Corée du Sud.
Trump passe outre les avis des spécialistes
Au bout du compte, la responsabilité en incombe à Donald Trump, qui gère cette crise comme à peu près tout le reste, à savoir comme s’il ne s’agissait que de nouvelles informations qu’il peut manipuler au profit de son image et de son ego. Il n’a eu de cesse de minimiser la gravité du problème et de passer outre les avis des spécialistes. Tout dernièrement, il a encore refusé de recommander aux personnes âgées de ne pas prendre l’avion. Au début du mois, dans une mise en scène digne de la Corée du Nord, il s’est montré entouré des responsables des CDC, tandis que ses conseillers le félicitaient pour sa gestion et qu’il se vantait de ses propres connaissances scientifiques.L’idée de comparer les réactions de Washington et Pékin face à la crise n’a rien d’une invention médiatique. Loin de mettre de côté leurs différends ainsi que l’exigerait une crise de santé publique de portée planétaire, les États-Unis et la Chine se sont jetés à corps perdu dans un affrontement autour du Covid-19. Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a fait tout son possible pour parler du “virus de Wuhan” et a ouvertement reproché au Parti communiste chinois (PCC) d’avoir refusé de partager ses données avec les États-Unis [la communauté scientifique internationale s’est toutefois félicitée de la qualité des échanges avec ses collègues chinois]. Quant aux prestations de son gouvernement dans ce domaine, Pompeo a asséné : Je suis persuadé que nous saurons mieux gérer [la crise] que n’importe quel autre pays dans le monde.”
Théories du complot et accusations réciproques
En dépit de la confiance affichée par la Chine sur un retour à la normale de la vie et des affaires, en réalité, le pays est encore ébranlé par l’épidémie, qui a vu la deuxième économie la plus puissante de la planète se retrouver virtuellement au point mort durant les premiers mois de l’année. La Chine se remet au travail, mais cela mérite-t-il que l’on courre le risque d’une nouvelle vague de Covid-19 ?En Chine, la propagande reste le meilleur indicateur pour qui veut analyser ce qui se passe dans la tête des dirigeants du système de parti unique. Le gouvernement a d’ores et déjà publié un petit livre qui met en avant la gestion de la crise par Pékin. À Wuhan, le nouveau secrétaire du parti [son prédécesseur a été limogé] a dit mettre en place “une éducation à la gratitude” pour les habitants de la ville, en isolement depuis la fin janvier, afin de leur rappeler les superbes accomplissements des autorités [à la suite d’un concert de protestations sur les réseaux sociaux, il a transformé la campagne en “gratitude envers les habitants de Wuhan”].
À Pékin, le ministère des Affaires étrangères affirme maintenant que si le virus a été découvert à Wuhan, il n’en est pas forcément parti, ce qui permet à la Chine de se couvrir en alimentant les théories du complot sur une origine étrangère de l’épidémie [les États-Unis étant nommément désignés]. Et Pékin dépeint la bataille contre le virus comme une campagne altruiste au nom de la planète. Comme l’a dit l’ambassadeur chinois aux Nations unies :La Chine ne se bat pas que pour elle, mais pour le monde entier.”
Écouter des leçons que la Chine a d’abord ignorées
Certes, les États-Unis ne sont pas la seule démocratie à citer en exemple dans le domaine de la gestion d’une crise de santé publique. Si le Covid-19 n’en est encore qu’à ses débuts sur leurs territoires, l’Australie, la Corée du Sud et Taïwan ont fait preuve, chacune à sa façon, de clarté et de fermeté face à l’épidémie, avec le soutien de systèmes de santé efficaces. Reste que Pékin ne se compare pas à ces économies. C’est avec Washington que la Chine est en concurrence.
La principale leçon de la pandémie semble être la suivante : il faut écouter les avis des spécialistes et communiquer clairement avec le public. Des leçons que la Chine a d’abord ignorées, ce qui lui a coûté cher. La Maison-Blanche de Trump est peut-être en train de commettre exactement les mêmes erreurs.
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