INFO OBS. Depuis plusieurs années, Jack Lang profite des largesses du propriétaire de Smalto, Alain Duménil, un homme d’affaires mis en examen dans une affaire de banqueroute frauduleuse.
Par Vincent Monnier Publié le 08 mars 2019 à 17h17
Les hommes politiques français et les costumes. Il y aurait sûrement une anthologie à écrire un jour sur le sujet. En attendant, c’est plutôt dans les rubriques faits divers des médias que cette relation s’expose à intervalles réguliers. On se souvient du penchant coupable de François Fillon pour le célèbre couturier Arnys. La révélation du nom du généreux mécène lui ayant offert des costumes après sa victoire lors de la primaire de la droite, l’avocat et vieux brisquard de la Françafrique Robert Bourgi, avait accéléré sa chute lors de la présidentielle de 2017.
Selon nos informations, Jack Lang, l’ancien ministre de la Culture, en pincerait plutôt pour l'italien Smalto, habilleur de l’équipe de France de football. Entre 2013 et 2018, l’actuel président de l’Institut du monde arabe (IMA) aurait commandé pour près de 195.600 euros de costumes et pantalons de la ligne couture du célèbre tailleur, selon des documents dont "l'Obs" a eu connaissance. Une somme conséquente pour celui qui affirmait dans le magazine "Challenges" gagner "9.000 euros brut" mensuels à la tête de l’IMA.
Il faut dire que l’ancien homme politique socialiste bénéficierait de tarifs plus que préférentiels (-50%) de la part du propriétaire de la célèbre marque italienne, Alain Duménil, un aventurier du monde des affaires présent dans le luxe et l’immobilier. Condamné à plusieurs reprises par le passé, ce dernier a en outre réglé l’essentiel des factures de l’ancien ministre sur ses propres deniers, selon nos informations.
"Alain Duménil confirme effectivement avoir réglé différentes factures d’achats de costumes et de pantalons chez Smalto pour Monsieur Jack Lang, répond son avocat, Me Nicolas Huc-Morel. Il ne peut confirmer ni le montant ni la période. Monsieur Jack Lang représente pour lui un homme de la mode et de l’élégance connu dans le monde entier."
Ces cadeaux auraient été faits par "pure amitié", selon l’avocat, "sans aucun retour".
Les espions français l’accusent en effet d’avoir dilapidé, au terme de manœuvres qu’ils jugent frauduleuses, une partie de leur trésor de guerre. Cet argent avait été investi dans une société de prêt-à-porter de luxe reprise ensuite par l’homme d’affaires, lequel conteste toute "spoliation" des actifs de la DGSE.
En janvier 2017, Alain Duménil avait, pour sa part, déposé plainte pour "tentative d'extorsion" et "détention et séquestration", se disant victime d'une tentative de racket par des agents du service de renseignement à l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. Récemment, l’intéressé, qui réside entre Crans-Montana (Suisse) et Paris, s’est également retrouvé dans le collimateur des autorités fiscales suisses et françaises.
Pas de quoi échauder pour autant l’ancien ministre socialiste. Grâce à la générosité d’Alain Duménil, un temps sponsor d’un prix littéraire portant son nom, le mieux doté de Paris, les factures de Jack Lang ont bénéficié d’une ristourne XXL : 50% de remise. Selon Me Nicolas Huc-Morel, ces rabais correspondraient à ceux dont bénéficieraient les salariés de l’entreprise et les invités des soldes presse.
En mai 2018, la directrice de Smalto, en place depuis un an, décide toutefois de bloquer cette commande avant son départ pour l’atelier. La raison ? Elle est double. Une telle remise de 50% ne couvre pas les frais de fabrication. Par ailleurs, l’ancien ministre n’a, à l’époque, toujours pas réglé les 17.000 euros correspondant à deux précédentes factures datées du 13 février et du 25 octobre 2017. Bizarrement, la direction de Smalto se tourne alors vers l’assistante d’Alain Duménil pour obtenir le règlement des sommes dues avant la clôture des comptes annuels et non vers l’ancien ministre.
Contacté par "l'Obs", Me Laurent Merlet, l'avocat de Jack Lang, confirme que l'ancien ministre s'est bien fait offrir des costumes et des pantalons par Smalto : "C'est le couturier Francesco Smalto - NDLR : mort en 2015 - qui avait proposé à Jack Lang de l'habiller. Il considérait qu'il était un bon ambassadeur pour la marque. L'actuel propriétaire de Smalto a continué cette pratique. D'ailleurs, d'autres marques comme Issey Miyaké et Comme des garçons en font de même". Une manière de "sponsoring" de la part de Smalto qui aurait commencé alors que le politique exerçait encore des mandats politiques. Selon l'avocat de Jack Lang, son client n'aurait jamais reçu "la moindre facture à régler" de la part du tailleur. "Il n'y a jamais eu la moindre contrepartie", ajoute Me Laurent Merlet.
Ce n’est pas la première fois que les largesses d’Alain Duménil à l’égard de responsables politiques ou de leurs conjoints remontent à la surface. "Une façon de se ménager leurs faveurs", susurre un ancien de la maison... Au milieu des années 2000, "le Canard enchaîné" évoquait une remise de 86% accordée sur une facture Smalto à Mme Perben, la femme du ministre de la Justice de l’époque. Une pratique des plus courantes au sein du groupe, selon un ancien cadre contacté par "l'Obs" :
Selon nos informations, Jack Lang, l’ancien ministre de la Culture, en pincerait plutôt pour l'italien Smalto, habilleur de l’équipe de France de football. Entre 2013 et 2018, l’actuel président de l’Institut du monde arabe (IMA) aurait commandé pour près de 195.600 euros de costumes et pantalons de la ligne couture du célèbre tailleur, selon des documents dont "l'Obs" a eu connaissance. Une somme conséquente pour celui qui affirmait dans le magazine "Challenges" gagner "9.000 euros brut" mensuels à la tête de l’IMA.
Il faut dire que l’ancien homme politique socialiste bénéficierait de tarifs plus que préférentiels (-50%) de la part du propriétaire de la célèbre marque italienne, Alain Duménil, un aventurier du monde des affaires présent dans le luxe et l’immobilier. Condamné à plusieurs reprises par le passé, ce dernier a en outre réglé l’essentiel des factures de l’ancien ministre sur ses propres deniers, selon nos informations.
"Alain Duménil confirme effectivement avoir réglé différentes factures d’achats de costumes et de pantalons chez Smalto pour Monsieur Jack Lang, répond son avocat, Me Nicolas Huc-Morel. Il ne peut confirmer ni le montant ni la période. Monsieur Jack Lang représente pour lui un homme de la mode et de l’élégance connu dans le monde entier."
Ces cadeaux auraient été faits par "pure amitié", selon l’avocat, "sans aucun retour".
Escroquerie de la DGSE
Condamné en 2012 par la cour d’appel de Grenoble pour complicité de banqueroute, puis en 2014 pour outrage à personne dépositaire de l’autorité publique, Alain Duménil fait actuellement l’objet d’une mise en examen dans une rocambolesque affaire impliquant la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).Les espions français l’accusent en effet d’avoir dilapidé, au terme de manœuvres qu’ils jugent frauduleuses, une partie de leur trésor de guerre. Cet argent avait été investi dans une société de prêt-à-porter de luxe reprise ensuite par l’homme d’affaires, lequel conteste toute "spoliation" des actifs de la DGSE.
En janvier 2017, Alain Duménil avait, pour sa part, déposé plainte pour "tentative d'extorsion" et "détention et séquestration", se disant victime d'une tentative de racket par des agents du service de renseignement à l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. Récemment, l’intéressé, qui réside entre Crans-Montana (Suisse) et Paris, s’est également retrouvé dans le collimateur des autorités fiscales suisses et françaises.
Pas de quoi échauder pour autant l’ancien ministre socialiste. Grâce à la générosité d’Alain Duménil, un temps sponsor d’un prix littéraire portant son nom, le mieux doté de Paris, les factures de Jack Lang ont bénéficié d’une ristourne XXL : 50% de remise. Selon Me Nicolas Huc-Morel, ces rabais correspondraient à ceux dont bénéficieraient les salariés de l’entreprise et les invités des soldes presse.
"Des politiques, de droite et de gauche"
Le 23 avril 2018, une nouvelle commande de l’ancien ministre fait grincer quelques dents chez Smalto. La société traverse alors une période difficile – elle a enregistré une perte nette de 3,6 millions d’euros sur l'exercice 2018. Ladite commande porte sur deux nouveaux costumes et pantalons façonnés en Loro Piana, l’un des meilleurs tissus du marché. Le montant s’élève à 19.000 euros, une fois la remise de 50% déduite.En mai 2018, la directrice de Smalto, en place depuis un an, décide toutefois de bloquer cette commande avant son départ pour l’atelier. La raison ? Elle est double. Une telle remise de 50% ne couvre pas les frais de fabrication. Par ailleurs, l’ancien ministre n’a, à l’époque, toujours pas réglé les 17.000 euros correspondant à deux précédentes factures datées du 13 février et du 25 octobre 2017. Bizarrement, la direction de Smalto se tourne alors vers l’assistante d’Alain Duménil pour obtenir le règlement des sommes dues avant la clôture des comptes annuels et non vers l’ancien ministre.
Contacté par "l'Obs", Me Laurent Merlet, l'avocat de Jack Lang, confirme que l'ancien ministre s'est bien fait offrir des costumes et des pantalons par Smalto : "C'est le couturier Francesco Smalto - NDLR : mort en 2015 - qui avait proposé à Jack Lang de l'habiller. Il considérait qu'il était un bon ambassadeur pour la marque. L'actuel propriétaire de Smalto a continué cette pratique. D'ailleurs, d'autres marques comme Issey Miyaké et Comme des garçons en font de même". Une manière de "sponsoring" de la part de Smalto qui aurait commencé alors que le politique exerçait encore des mandats politiques. Selon l'avocat de Jack Lang, son client n'aurait jamais reçu "la moindre facture à régler" de la part du tailleur. "Il n'y a jamais eu la moindre contrepartie", ajoute Me Laurent Merlet.
Ce n’est pas la première fois que les largesses d’Alain Duménil à l’égard de responsables politiques ou de leurs conjoints remontent à la surface. "Une façon de se ménager leurs faveurs", susurre un ancien de la maison... Au milieu des années 2000, "le Canard enchaîné" évoquait une remise de 86% accordée sur une facture Smalto à Mme Perben, la femme du ministre de la Justice de l’époque. Une pratique des plus courantes au sein du groupe, selon un ancien cadre contacté par "l'Obs" :
"Lors de soldes du bijoutier Poiray [racheté puis revendu par Alain Duménil, NDLR], la secrétaire de Duménil avait récupéré la facture d’une femme de ministre de Sarkozy pour lui faire un rabais de 90%. Des politiques, de droite et de gauche, ont eu le droit à des costumes Smalto Couture à des prix sacrifiés."
Lors d’un entretien avec "l'Obs" en 2017, Alain Duménil n’avait pas contesté offrir régulièrement des cadeaux ou de très importantes remises à des personnalités : "Toutes les marques de luxe le font", arguait-il alors.
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