Nous vivons
actuellement une nouvelle rupture pour le commerce mondial qui préfigure
l’entrée dans une nouvelle ère de la mondialisation. Pour bien
comprendre comment nous en sommes arrivés là, un retour historique
s’impose. Je vais plus précisément suivre l’évolution du ratio
exportations sur PIB mondial pour mesurer la réelle influence des
échanges internationaux sur la croissance.
Après un difficile démarrage
au début des années 90, le commerce mondial monte en puissance à partir
de 1994. Son envolée durant les 3 années qui suivent résulte pour partie
de la synchronisation des différentes régions du monde, qui se placent
peu à peu dans le sillage de la reprise américaine mais elle relève
aussi de causes structurelles plus profondes : baisse des coûts de
transports, de communication ainsi que du mouvement de libéralisation
des échanges. C’est à ce moment aussi que prend racine le mouvement de
délocalisations vers les émergents, mais surtout que monte en puissance
une gigantesque vague de méga-fusions-acquisitions transatlantiques
menées par les multinationales occidentales. La part des exports dans le
PIB mondial franchit alors le seuil des 17% pour se rapprocher à deux
dixième seulement de son record de 1980. En 1998, la crise des émergents
provoque une première cassure. La sortie massive des capitaux va les
plonger dans une récession brutale. Ce bref épisode, va pousser alors
les émergents, dont la Chine, à adopter des stratégies délibérément
mercantilistes et à accumuler des devises pour ne plus se faire
surprendre.
Survient ensuite la triple rupture des années 2000, avec la
crise de la bulle internet, l’entrée de la Chine dans l'OMC fin 2001 et
l’introduction des pièces et des billets en euros en 2002 qui va
accélérer les échanges intra-européens. En quête de profitabilité et
désireux de partir à la conquête des nouvelles classes moyennes
émergentes, les multinationales occidentales, vont accélérer leur
déploiement vers les BRICs. Les chaînes de valeurs s'allongent et se
complexifient toujours plus : à la fin des années 2000, près de la
moitié des échanges mondiaux se font alors dans le cadre de chaînes de
valeur mondiales, contre 36% en 1995. Des évolutions dont les pays
émergents sortent grands vainqueurs.
Comptablement, les composants d'un
même produit passent plusieurs fois les frontières, dopant les chiffres
du commerce extérieur. La flambée des matières premières participe
également à l’envolée de 89% des exportations en valeur sur la période
2000-2008. Bilan, le poids des exportations mondiales sur le PIB monde
se hisse au niveau record de 25,2%. On ne le sait pas encore mais c’est
le pic de la série, un pic jamais égalé depuis. La crise de 2008-2009
rebat les cartes. Le monde perd sa locomotive émergente. La production
se recentre ainsi par grandes zones continentales, les chaînes de valeur
raccourcissent. Un retour de balancier par rapport à la version la plus
extrême du fabless, de l’allongement à outrance des chaînes de valeur.
Surtout, l’apparition d’une nouvelle classe moyenne au pouvoir d’achat
étendu, capable de supplanter celle des pays avancés dans les débouchés
des firmes multinationale, a vécu.
Désormais, la mondialisation est
bicéphale avec d’un côté, un pôle, nord, occidental centré autour des
Etats-Unis et de l’autre un pôle sud, articulé autour de la Chine. La «
Chinamérique » a elle aussi vécu et nous sommes bien dans une phase de «
désintrication » avec ses conséquences en cascade sur l’évolution des
exportations mondiales. Le poids des exportations dans le PIB mondial
reflue. Ce n’est pas seulement la trace de la chute du prix des matières
premières mais bien celle d’un basculement vers une nouvelle phase de
la mondialisation.
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