La crise du Covid-19 a bouleversé le paysage énergétique mondial entraînant une chute historique de la demande et des émissions de CO2. À long terme, cependant, cela ne devrait pas avoir un impact majeur sur les grandes tendances : un développement rapide des énergies renouvelables, le déclin du charbon et une hausse globale de la demande énergétique.
L'Agence internationale de l'Énergie vient de publier ses prévisions annuelles qui s'appuient sur différents scénarios. Dans le premier, dit « à mesures constantes », la tendance suit les politiques actuelles engagées par les pays en matière de réduction de CO2. Dans un second scénario, dit « durable », des politiques plus volontaristes sont engagées, avec un objectif de neutralité carbone d'ici 2070. Transport, électricité, pétrole... Voici à quoi va ressembler le monde de demain.
16 millions de km de lignes électriques à construire
L'intégration des nouvelles capacités de solaire et d'éolien, beaucoup plus décentralisées que les centrales classiques, vont nécessiter une extension sans précédent du réseau électrique : 2 millions de km de lignes de transmission et 14 millions de km lignes de distribution vont devoir être construites dans les 10 prochaines années, soit un investissement de 460 milliards de dollars pour digitaliser, moderniser et étendre le réseau. « Malgré cela, le réseau électrique pourrait bien constituer le maillon faible de la transformation », prévient l'AIE.
110 millions de personnes de plus avec un accès à l’électricité
En 2019, 770 millions de personnes restaient sans accès à l’électricité et 2,6 milliards dépendent du bois pour cuire leur nourriture. En 2030, 110 millions de personnes seront raccordées au réseau et 2 millions de plus auront accès à de l'énergie propre pour la cuisine. Ce qui signifie que 660 autres millions seront encore privées d'électricité, un chiffre plus élevé que dans les précédents scénarios en raison de la crise du Covid qui retarde la reprise économique dans de nombreux pays.
-8 % de demande d’énergie du charbon
L'apogée du charbon est définitivement révolue. En 2030, la demande pour ce type d'énergie sera 8 % inférieure à celle de 2019 en suivant la tendance actuelle, de 40 % inférieure dans un scénario durable. Malgré cette baisse, le charbon restera la première source d'émissions de CO2 (38 % des émissions). Si les pays développés vont connaître la plus forte chute (-60 % dans l'Union européenne), l'Inde va au contraire enregistrer la plus forte croissance et représentera à elle seule 14 % de la demande mondiale de charbon en 2030.
76 dollars : le prix du baril de pétrole en 2030
Un rebond des investissements devrait conduire à une hausse du prix du pétrole qui était de 63 dollars en 2019. Il devait ainsi remonter à 76 dollars en 2030 et 85 dollars en 2040. En revanche, dans un scénario durable, le prix du baril pourrait s'effondrer à 53 dollars en 2040, en raison d'une chute de la demande amenant à des surcapacités mondiales et de politiques de taxation du carbone.
40 % de voitures électriques vendues
Dans le scénario durable, 40 % des voitures vendues en 2030 seront électriques ou à hydrogène (contre 2,5 % en 2019). Du coup, les émissions de CO2 dues au transport vont subir un déclin impressionnant : 1,1 gigatonne de CO2 en moins. Autre facteur qui pourrait contribuer à la baisse des émissions : une réduction de la vitesse sur autoroute (on estime qu'une réduction de 10 km/h correspond entre 7 à 18 % de consommation de carburant en moins). Néanmoins, le trafic mesuré en passagers-kilomètres devrait augmenter d'un quart entre 2019 et 2030 en raison de l'accroissement de la population et de la hausse du taux d'équipement.
+55 % de trajets en avion
Malgré la crise du Covid-19, qui a durablement affecté le secteur de l'aviation, l'activité aérienne (mesurée en nombre de kilomètres multiplié par le nombre de passagers) va augmenter de 55 % d'ici à 2030. Contrairement à ce qu'on pense souvent, seule la moitié des vols sont dus au tourisme, les visites à la famille et les voyages d'affaires comptant pour un quart du trafic chacun. En dépit de cette augmentation, les émissions liées à l’aérien devraient diminuer de 10 % d'ici à 2030, grâce à des mesures d'efficacité énergétique et à l'usage de biocarburant.
850 millions de personnes en plus exposées à la pollution
Malgré une baisse globale des polluants de 10 à 20 % d'ici 2030, l'urbanisation croissante va faire que 850 millions de personnes en plus vivront dans un environnement pollué. La pollution intérieure, principalement liée à la cuisine au bois, continue d'être un risque majeur pour ces populations. Au total, 500.000 naissances prématurées supplémentaires pourraient résulter de cette exposition en 2030.
+15 % d’électricité nucléaire
La production d'énergie nucléaire va s'accroître de 15 % globalement d'ici 2030, mais sa part dans le mix énergétique va légèrement décliner. Alors que la production va augmenter de 60 % dans les marchés émergents, elle va décliner de 20 % dans l'Union européenne et de 10 % aux États-Unis, selon l'AIE. La Chine, seul pays à avoir inclus le nucléaire dans sa stratégie de baisse des émissions de CO2, sera alors le leader mondial du nucléaire.
10,2 TW de capacité électrique
La capacité électrique mondiale va s'accroître de 2.711 GW entre 2019 et 2030, amenant à une capacité totale de 10.195 GW. Malgré cette hausse spectaculaire, les émissions de CO2 liées à la production électrique vont décliner de 917 millions de tonnes, grâce aux gains d'efficacité énergétique (-111 g de CO2 par kWh produit). Un gain lié bien évidemment au boom des énergies renouvelables (solaire et éolienne) et à la baisse du charbon.
30 dollars : le coût du MWh d’électricité solaire en 2040
Le coût du solaire photovoltaïque va poursuivre sa chute vertigineuse dans les prochaines années, passant de 50 dollars par MWh en 2019 à moins de 30 dollars en 2040. Ce sera alors de loin l'énergie la moins chère, comparée au gaz naturel (65 dollars/MWh) ou au nucléaire (100 dollars/MWh). Néanmoins, le solaire est aussi l'énergie ayant le plus faible facteur de capacité : les panneaux ne génèrent de l'énergie que 23 % du temps, contre 90 % pour la nucléaire. Le coût réel est donc nettement plus élevé quand on prend en compte les capacités additionnelles nécessaires.
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