La
grande force d'Emmanuel Macron est de ne pas être un homme de parti,
c'est ce qui lui a permis d'être élu en dépassant les clivages
historiques entre droite et gauche. Mais cette force cache aussi une
faiblesse : la difficulté d'obtenir une majorité présidentielle solide à
la tête d'un mouvement politique qui fête à peine sa première année.
Or,
le président a été clair dès l'entre-deux tours : il ne veut ni amender
ni négocier son projet. Pour tenir cette position, il lui faut une
majorité absolue à l'Assemblée nationale, alors que les sondages ne
donnaient qu'une majorité relative à LREM avant la nomination d'Édouard
Philippe, impliquant négociations, voire alliances, avec d'autres
formations politiques.
La République en
marche, qui se veut "et de droite, et de gauche", ne pourrait
raisonnablement pas accepter un accord avec ce qu'il reste du Parti
socialiste, ou avec les Républicains, tant ces deux options
déstabiliseraient son fragile équilibre.
En
revanche, des membres isolés de ces deux partis pourraient se rallier à
la majorité après les élections législatives, ou a minima, voter
certaines propositions du gouvernement. C'est l'espoir des responsables
de LREM, qui ont pris la décision de ne pas investir de candidats face
aux membres progressistes de LR ou du PS, laissant la porte ouverte à
d'éventuelles discussions. Mais cette solution ressemble à un dernier
ressort qui créerait des risques de fronde et fragiliserait d'emblée la
majorité présidentielle.
Dans ce contexte,
Emmanuel Macron n'a pas d'autre choix que de rassembler largement. Avec
un gouvernement équilibré entre personnalités issues de la droite, de
la gauche, du centre et de la société civile, l'objectif est clair :
obtenir une majorité indépendante, pour éviter d'éventuels compromis.
Cette stratégie présente le bénéfice d'être cohérente avec l'ensemble de
la démarche du fondateur d'En Marche, mais aussi le mérite d'avoir été
bien réalisée, avec notamment l'inclusion de personnalités respectées
dans leurs domaines respectifs, et parfois très populaires, comme c'est
le cas de Nicolas Hulot.
Mais le véritable
coup politique d'Emmanuel Macron réside dans la nomination d'une
personnalité de droite au poste de Premier ministre, qui crée l'illusion
d'un large rassemblement alors que les Républicains n'ont saisi la main
tendue du président qu'à très petite échelle. Avec des ralliements qui
ressemblent davantage à l'ouverture que Nicolas Sarkozy avait réussie en
2007, en intégrant Bernard Kouchner ou Jean-Pierre Jouyet au
gouvernement, qu'à une tendance de fond.
Quoi
qu'il en soit, il faudra espérer que les réformes menées sortent
rapidement la France de la crise durable dans laquelle elle est
embarquée. Car même s'il est inexact, le discours de Marine Le Pen sur
l'UMPS, acronyme remplacé par LREM depuis le début de la semaine,
devrait trouver un écho encore plus grand avec ce gouvernement
représentant un large spectre de tendances républicaines. Et si les
Français ont fait barrage au populisme cette année, il n'est pas certain
qu'ils fassent preuve d'autant d'indulgence en cas de nouvel échec.
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