Airbus licencie, mais ce n'est pas à cause des déboires de l'A380
INDUSTRIE - Voilà une nouvelle vague de licenciements qui risque de faire du bruit. Airbus,
fleuron international de l'industrie aéronautique, a annoncé ce mardi
29 novembre que 1164 postes seront supprimés en Europe en 2017 dans le
cadre de sa restructuration. Le chiffre a été communiqué par les
syndicats à la mi-journée et confirmés par la direction.
La suppression de 1164 postes dans tous les sites doit s'accompagner de la création de 230 emplois, "ce qui fait un solde net de moins de 1000 suppressions de postes au total", a expliqué à la presse Yvonnick Dréno, coordonnateur FO pour Airbus Group, syndicat majoritaire. La direction a par ailleurs annoncé la cessation en 2018 de toute activité de recherche sur le site de Suresnes, dans les Hauts-de-Seine, "soit 308 suppressions de postes et 150 'mobilités' de Suresnes vers Toulouse".
Ce plan de restructuration se fera sur la base du volontariat mais le groupe n'exclut pas des licenciements si ses objectifs ne sont pas atteints en 2018, a précisé le directeur des ressources humaines, Thierry Baril, à l'AFP.
Alors que la campagne présidentielle de 2017 est dans toutes les têtes, juste après la primaire de la droite, la préservation de l'industrie française et de ses emplois est devenue un enjeu crucial, comme l'ont montré les dossiers Alstom à Belfort, mais aussi le chantier de Saint Nazaire, l'usine Peugeot d'Aulnay-sous-Bois, ou les hauts fourneaux de Florange.
Mais attention aux amalgames: Airbus n'a rien à voir avec le déclin de l'industrie française. Malgré les difficultés très coûteuses de deux programmes clés, l'A380 et l'A400M, chiffre d'affaires et rentabilité sont en hausse constante depuis des années. "Le marché est toujours aussi porteur. L'aérien grandit toujours deux fois plus vite que la croissance d'un pays", explique au HuffPost Xavier Tytelman, consultant indépendant dans l'aviation.
Au-delà des apparences, voici pourquoi il n'y a vraiment pas de soucis à se faire pour ce géant de l'aviation.
1. Oui, les ventes de l'A380 sont très décevantes...
Airbus a décidé en octobre de réduire la production de son superjumbo, en raison du manque de commandes. La cadence de production va baisser à un appareil par mois à partir de 2018 (seuil minimum pour conserver les compétences), contre 2,5 par mois aujourd'hui.
"Cette décision nous permet de lisser nos livraisons en attendant de nouvelles commandes", a déclaré Alain Flourens, directeur du programme A380, au Figaro.
Sans parler de flop, l'A380 a clairement déçu. "Il a trouvé son public, mais il ne s'en vend pas autant que prévu, tempère Xavier Tytelman. Le carnet de commande ne se remplit pas assez vite. L'A380 a un ou deux ans de commandes devant lui. C'est trop court dans un métier où il faut cinq ans de commandes pour pérenniser de gros investissements industriels."
Fin août 2016, il restait 124 superjumbos à livrer sur les 319 appareils commandés depuis le lancement commercial de l'A380 en 2000. Là où l'avionneur en espérait 1200 selon La Tribune...
Alors que 144 commandes fermes étaient signées lors du premier vol commercial en 2005, le programme n'a plus vraiment séduit par la suite. Seule Emirates a parié dessus. Avec 142 exemplaires, la compagnie du Golfe est responsable de 45% du carnet de commande.
Mais Airbus s'est ajusté depuis longtemps à cette mauvaise fortune. Même si l'A380 est beaucoup plus cher que la moyenne des avions en catalogue, son importance commerciale reste relative: Airbus a livré un total de 635 avions en 2015.
Et de toute façon, l'avion ne perd plus d'argent. "Malgré un nombre inférieur de livraisons d'A380 (27 avions en 2015 contre 30 en 2014), le programme a atteint l'équilibre pour la première fois en 2015", explique le rapport annuel de l'avionneur.
2. Oui, les atermoiements de l'A400M coûtent cher...
Avec dix ans de retards cumulés, le programme de transporteur militaire est une épine dans le pied d'Airbus. Malgré une première sortie d'usine en 2008, il n'obtient l'homologation pour un usage militaire qu'à partir de 2013. Au total, il aurait accumulé des surcoûts de l'ordre de 6 milliards d'euros.
Les défaillances techniques s'enchaînent aussi, comme le 9 mai 2015 en Espagne où 3 des 4 moteurs se sont arrêtés en plein vol d'essai. Le crash a tué quatre personnes.
Résultat, les ventes qu'il génère sont encore confidentielles à l'échelle du groupe. "Des progrès techniques sur le programme A400M ont permis d'enregistrer des revenus liés de 0,5 milliard d'euros en 2012, 1 milliard en 2013, 1,6 milliard en 2014 et 1,6 milliard en 2015", détaille le rapport annuel d'Airbus.
"Chez Boeing, le militaire est la vache à lait. Chez Airbus, c'est le civil qui éponge les pertes du militaire, explique Xavier Tytelman. Mais l'A400M est opérationnellement extraordinaire. Dans 10 ans, on n'en dira que du bien."Il faut dire que là où Boeing se contente de définir un seul modèle pour le marché américain, Airbus doit composer avec les exigences des différentes armées du continent, et s'adapter. En attendant, plus de 120 commandes ont été passées par la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne ou encore l'Australie.
3. ...mais cette restructuration est avant tout administrative
La réorganisation du groupe, baptisée Gémini, consiste à fusionner à Toulouse les sièges de l'actuel Airbus, division d'aviation commerciale, au sein d'Airbus Group, qui réunit également les autres filiales dans les hélicoptères, la défense et l'espace. La nouvelle société, à naître l'an prochain, sera tout simplement baptisée "Airbus".
Elle touche presque exclusivement les fonctions administratives et non opérationnelles. Elle est destinée à éviter les "duplications" et à gagner en "agilité", selon la société.
"Le groupe EADS a fini par prendre le nom de sa plus grosse marque, Airbus. Pour le marketing, la communication, etc., vendre la même marque, cela génère forcément des doublons," décrypte Xavier Tytelman pour Le HuffPost.
Ce qui n'empêche pas les syndicats de douter du bien-fondé du plan. "On a un peu de mal à voir la logique stratégique. On voit surtout la logique financière", estime Jean-Marc Escourrou, secrétaire FO.
Pour l'avionneur, malgré un carnet de commandes record de près de 1000 milliards d'euros, soit 8 à 10 ans de production, c'est l'occasion de réduire ses coûts. Mais pas de panique, Airbus reste une entreprise florissante, loin d'avoir les comptes dans le rouge.
Chiffre d'affaires et résultat net du groupe Airbus, en milliard d'euros. Source: Airbus.
Source: huffingtonpost.fr
La suppression de 1164 postes dans tous les sites doit s'accompagner de la création de 230 emplois, "ce qui fait un solde net de moins de 1000 suppressions de postes au total", a expliqué à la presse Yvonnick Dréno, coordonnateur FO pour Airbus Group, syndicat majoritaire. La direction a par ailleurs annoncé la cessation en 2018 de toute activité de recherche sur le site de Suresnes, dans les Hauts-de-Seine, "soit 308 suppressions de postes et 150 'mobilités' de Suresnes vers Toulouse".
Ce plan de restructuration se fera sur la base du volontariat mais le groupe n'exclut pas des licenciements si ses objectifs ne sont pas atteints en 2018, a précisé le directeur des ressources humaines, Thierry Baril, à l'AFP.
Alors que la campagne présidentielle de 2017 est dans toutes les têtes, juste après la primaire de la droite, la préservation de l'industrie française et de ses emplois est devenue un enjeu crucial, comme l'ont montré les dossiers Alstom à Belfort, mais aussi le chantier de Saint Nazaire, l'usine Peugeot d'Aulnay-sous-Bois, ou les hauts fourneaux de Florange.
Mais attention aux amalgames: Airbus n'a rien à voir avec le déclin de l'industrie française. Malgré les difficultés très coûteuses de deux programmes clés, l'A380 et l'A400M, chiffre d'affaires et rentabilité sont en hausse constante depuis des années. "Le marché est toujours aussi porteur. L'aérien grandit toujours deux fois plus vite que la croissance d'un pays", explique au HuffPost Xavier Tytelman, consultant indépendant dans l'aviation.
Au-delà des apparences, voici pourquoi il n'y a vraiment pas de soucis à se faire pour ce géant de l'aviation.
1. Oui, les ventes de l'A380 sont très décevantes...
Airbus a décidé en octobre de réduire la production de son superjumbo, en raison du manque de commandes. La cadence de production va baisser à un appareil par mois à partir de 2018 (seuil minimum pour conserver les compétences), contre 2,5 par mois aujourd'hui.
"Cette décision nous permet de lisser nos livraisons en attendant de nouvelles commandes", a déclaré Alain Flourens, directeur du programme A380, au Figaro.
Sans parler de flop, l'A380 a clairement déçu. "Il a trouvé son public, mais il ne s'en vend pas autant que prévu, tempère Xavier Tytelman. Le carnet de commande ne se remplit pas assez vite. L'A380 a un ou deux ans de commandes devant lui. C'est trop court dans un métier où il faut cinq ans de commandes pour pérenniser de gros investissements industriels."
Fin août 2016, il restait 124 superjumbos à livrer sur les 319 appareils commandés depuis le lancement commercial de l'A380 en 2000. Là où l'avionneur en espérait 1200 selon La Tribune...
Alors que 144 commandes fermes étaient signées lors du premier vol commercial en 2005, le programme n'a plus vraiment séduit par la suite. Seule Emirates a parié dessus. Avec 142 exemplaires, la compagnie du Golfe est responsable de 45% du carnet de commande.
Mais Airbus s'est ajusté depuis longtemps à cette mauvaise fortune. Même si l'A380 est beaucoup plus cher que la moyenne des avions en catalogue, son importance commerciale reste relative: Airbus a livré un total de 635 avions en 2015.
Et de toute façon, l'avion ne perd plus d'argent. "Malgré un nombre inférieur de livraisons d'A380 (27 avions en 2015 contre 30 en 2014), le programme a atteint l'équilibre pour la première fois en 2015", explique le rapport annuel de l'avionneur.
2. Oui, les atermoiements de l'A400M coûtent cher...
Avec dix ans de retards cumulés, le programme de transporteur militaire est une épine dans le pied d'Airbus. Malgré une première sortie d'usine en 2008, il n'obtient l'homologation pour un usage militaire qu'à partir de 2013. Au total, il aurait accumulé des surcoûts de l'ordre de 6 milliards d'euros.
Les défaillances techniques s'enchaînent aussi, comme le 9 mai 2015 en Espagne où 3 des 4 moteurs se sont arrêtés en plein vol d'essai. Le crash a tué quatre personnes.
Résultat, les ventes qu'il génère sont encore confidentielles à l'échelle du groupe. "Des progrès techniques sur le programme A400M ont permis d'enregistrer des revenus liés de 0,5 milliard d'euros en 2012, 1 milliard en 2013, 1,6 milliard en 2014 et 1,6 milliard en 2015", détaille le rapport annuel d'Airbus.
"Chez Boeing, le militaire est la vache à lait. Chez Airbus, c'est le civil qui éponge les pertes du militaire, explique Xavier Tytelman. Mais l'A400M est opérationnellement extraordinaire. Dans 10 ans, on n'en dira que du bien."Il faut dire que là où Boeing se contente de définir un seul modèle pour le marché américain, Airbus doit composer avec les exigences des différentes armées du continent, et s'adapter. En attendant, plus de 120 commandes ont été passées par la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne ou encore l'Australie.
3. ...mais cette restructuration est avant tout administrative
La réorganisation du groupe, baptisée Gémini, consiste à fusionner à Toulouse les sièges de l'actuel Airbus, division d'aviation commerciale, au sein d'Airbus Group, qui réunit également les autres filiales dans les hélicoptères, la défense et l'espace. La nouvelle société, à naître l'an prochain, sera tout simplement baptisée "Airbus".
Elle touche presque exclusivement les fonctions administratives et non opérationnelles. Elle est destinée à éviter les "duplications" et à gagner en "agilité", selon la société.
"Le groupe EADS a fini par prendre le nom de sa plus grosse marque, Airbus. Pour le marketing, la communication, etc., vendre la même marque, cela génère forcément des doublons," décrypte Xavier Tytelman pour Le HuffPost.
Ce qui n'empêche pas les syndicats de douter du bien-fondé du plan. "On a un peu de mal à voir la logique stratégique. On voit surtout la logique financière", estime Jean-Marc Escourrou, secrétaire FO.
Pour l'avionneur, malgré un carnet de commandes record de près de 1000 milliards d'euros, soit 8 à 10 ans de production, c'est l'occasion de réduire ses coûts. Mais pas de panique, Airbus reste une entreprise florissante, loin d'avoir les comptes dans le rouge.
Chiffre d'affaires et résultat net du groupe Airbus, en milliard d'euros. Source: Airbus.
Source: huffingtonpost.fr
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