15/12/2016

Valls, Montebourg, Hamon et des ratons laveurs : inventaire de la primaire de gauche

"L'open bar" va fermer. La primaire de la gauche va commencer. C'est ce jeudi 15 décembre la date limite pour déposer sa candidature à ce scrutin organisé par le Parti socialiste. Le casting définitif ne sera connu que samedi 17 décembre. Mais les pontes de Solférino ont déjà prévenu : pour éviter tout bazar en janvier lors des débats en prime time, sept concurrents suffiront amplement. Sauf surprise, on les connaît déjà. Inventaire.
Pourquoi la primaire de la gauche s'engage mal

Valls, Brutus contre tous

Tous veulent son scalp. Après avoir usé de toutes ses forces pour empêcher Hollande d'y aller, Manuel Valls va devoir battre à la loyale ses anciens ministres revanchards dans un scrutin très incertain. Les sondages le donnent certes en tête au premier tour. Mais aussi gagnant de justesse au second face à Arnaud Montebourg. Des sept candidats, l'ex-locataire de Matignon est celui qui a le plus à perdre. Alors il s'agite, s'adoucit, arrondit les angles et s'essaie à l'exercice préféré de François Hollande : la synthèse.

Problème : cet adepte de la transgression traîne à ses pieds un paquet de boulets. D'abord un bilan et des résultats peu probants, dont il est forcément comptable. Ensuite des textes qui ont clivé : déchéance de nationalité, loi Macron et loi travail. Et cette "théorisation des deux gauches irréconciliables" que ses concurrents lui serinent en boucle dès qu'un micro s'allume.

Valls a une arme (à double tranchant) dans la primaire : le soutien des ministres
Manuel Valls le sait bien. Alors il joue les modestes, feint de n'être que le "challenger" - mais alors qui est le favori ? - et exhibe à la face du monde ces ministres qui le rallient - de gré ou faute de mieux. Une image type pour intégrer le visage de chacun chacun défile d'ailleurs sur son compte Twitter. La partie est risquée pour l'ex-maire d'Evry. Perdre la primaire tuerait son espoir d'incarner la gauche réformiste au lendemain de la défaite annoncée.

Montebourg, Cincinnatus sans troupes

C'était à l'été 2014. Viré du gouvernement, Montebourg s'était comparé à Cincinnatus, ce général romain qui "préféra laisser le pouvoir et retourner à ses champs". L'ex-trublion de Bercy a depuis repris le chemin inverse. Mais il avance sans troupes. Ou si peu. Pour qui veut rassembler, ça commence à faire tache. Excepté l'humoriste Guy Bedos, qui l'a accompagné le week-end dernier, aucun nom ronflant n'est venu garnir les rangs du Bourguignon. Les derniers ralliés, Christian Paul, Jérôme Guedj, Emmanuel Maurel, appartiennent tous à l'aile gauche du PS... Et Christiane Taubira, à qui il a proposé une "discussion constructive", n'a toujours pas répondu.

Primaire de la gauche : "Libérer les Français", le credo du candidat Montebourg
"C'est normal, depuis que Hollande a renoncé, tout le monde doute", se rassure Philippe Baumel, un de ses partisans. Montebourg dira bien sûr qu'il s'en moque puisqu'il s'adresse aux Français. Mais sa campagne low cost, sans grand meeting pour l'instant, ne déchaîne pas non plus les foules.

Peillon, le retour du serpent

Vincent Peillon n'est pas prêt. Il n'y a qu'à voir son site internet, monté à la hâte. Sa candidature est tellement improvisée qu'il a dû régler une ardoise de 20.000 euros au PS, des cotisations impayées. C'est un eurodéputé peu assidu, un prof de philo à Neuchâtel en Suisse, un écrivain de polars, bref, un quasi retraité de la politique. Mais pas un candidat sérieux à la présidentielle. Ce n'était même le choix de Martine Aubry, qui a d'abord sondé Marisol Touraine, la ministre de la Santé, pour faire émerger une candidature anti-Valls.

Depuis son come back express, celui que Hollande avait qualifié de "serpent" pour son aptitude à "trahir" ses proches, a surtout mis en avant deux marqueurs : sa foi en l'Europe - son activité au Parlement n'en est pas la meilleure preuve -, et une "idée humaniste de la laïcité". Peut-il créer une surprise ? Tous les candidats jurent qu'il ne pique des voix qu'aux autres. Forcément. Mais aucun sondage ne l'a encore testé. Pour eux aussi, Peillon va trop vite.

Hamon, le bon Fillon

Benoît Hamon l'a dit mercredi en marge de son meeting à Paris. Il n'aime pas ce rapprochement avec François Fillon, ce méchant libéral de droite. "Ce n'est pas une bonne comparaison. Les primaires ne sont pas de la même nature. Ca ressemble plus à une réassurance des médias qu'autre chose."
Benoît Hamon se rêve en Fillon de la primaire de gauche
Des médias paniqués à l'idée de rater la prochaine dynamique ? A voir la confusion qui entoure pour l'heure la primaire, difficile de déceler quoi que ce soit. En attendant, les sondages cantonnent le député des Yvelines au rôle de troisième homme. Le retrait de Marie Noëlle-Lienemann peut l'aider. Mais le come back de Vincent Peillon l'affaiblir. Les entourages de ses rivaux lui reconnaissent toutefois un programme, à gauche et écolo, et une cohérence. Mais personne ne le critique vraiment. Signe que personne ne le craint ?

Pinel, la caution

C'est une triste réalité. Mais la radicale de gauche Sylvia Pinel sera dans les semaines qui viennent immanquablement ramenée à ce rôle : la-seule-femme-de-la-primaire-de-la-gauche. Son autre rôle n'est pas forcément plus enviable. Comme Jean-Michel Baylet il y a cinq ans, l'éphémère ministre du Logement jouera la porte-parole d'une candidature de témoignage. Celle d'un parti d'élu dont l'essentiel est ailleurs : négocier avec l'allié socialiste des circonscriptions réservées en vue des législatives...

Comme il y a cinq ans, les articles vont fleurir avec en titre cette question cruciale pour la marche du pays : "Mais à quoi peuvent bien servir les radicaux de gauche ?" A défendre leurs idées, diront-ils : la promotion de la laïcité, la légalisation du cannabis ou encore le rêve d'une Europe fédérale. Mais qui sait, Sylvia Pinel fera peut-être mieux que Jean-Michel Baylet en 2011 et ses 0,64% des voix.

De Rugy, l'écolo-triste

C'est lui l'écolo de la primaire, l'unique, le vrai. "Je serai le seul à mettre l’écologie au cœur du projet de la gauche", a lâché au "Monde" ce député de Loire-Atlantique. A l'échelle du quinquennat socialiste, de Rugy, c'est l'écolo docile et compatible. Un anti-Duflot en somme. Avec Jean-Vincent Placé, il s'est fâché tout rouge en avril 2014 quand l'ex-patronne des Verts a décidé, seule, de claquer la porte du gouvernement de Manuel Valls. Un an plus tard, il quittera EELV et sa "dérive gauchiste".
Ces cinq années, François de Rugy a toujours pris soin d'épargner Hollande ou de ne pas trop cogner dessus. Sans être servi en retour. Lors du remaniement de février dernier, trois écolos sont bien entrés au gouvernement - Emmanuelle Cosse, Barbara Pompili et Jean-Vincent Placé. Mais pas lui. Le 3 décembre dernier, au meeting de la Belle Alliance Populaire, porte de la Villette, à Paris, on l'a aperçu dans l'ombre au fond de la salle écouter les ministres taper sur Fillon. Il aurait rêvait d'en être. La vie est injuste.

Bennahmias, l'égaré

Le moment de gloire d'un "progressiste" égaré. Jean-Luc Bennahmias, 62 ans, a déjà gagné. Il va participer à la primaire de la gauche. Et c'est déjà énorme. Ce proche de François Hollande, qui l'a reçu plusieurs fois à l'Elysée ces dernières années, est sans mandat électif depuis 2014.
Elu eurodéputé sous la bannière des Verts en 2004, il avait rejoint le Modem avant de claquer la porte il y a deux ans ans et de fonder le Front démocrate. Un parti minuscule. Mais qui présente aujourd'hui cet avantage d'appartenir à la Belle Alliance Populaire. Les recalés de la primaire Pierre Larrouturou et Bastien Faudot en savent quelque chose.

Lors des débats qui arrivent, Benhammias plaidera pour la construction d'une "majorité progressiste" qui brasse "au-delà de la gauche", de "l'électorat de Jean-Luc Mélenchon" à celui de "Nathalie Kosciusko-Morizet à droite". Un large spectre. Une jolie histoire.

Source Nouvel Obs Remy Dodet

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